Les mecs se disent « on n’a rien à perdre, donc on y va et on casse »
« On ne traite pas de la même manière les manifestations de “Gilets jaunes” que les autres manifestations : il peut y avoir des débordements, les violences policières et beaucoup de tensions ; ce n’est pas le même délire. En France on a quand même une tradition de manifestations qui est assez ancrée – les gens utilisent leurs droits pour manifester et, depuis 2016, les manifestations sont de plus en plus violentes. Donc les “Gilets jaunes” c’est juste un ras-le-bol généralisé qui fait que les mecs se disent « on n’a rien à perdre, donc on y va et on casse ».
Journaliste,  France Info Paris

On ne sait plus trop sur quel pied danser, comment apporter un angle différent
« Ça n’a pas été la même chose du début jusqu’à maintenant. C’est lié au phénomène des casses, de la violence, de l’évolution du mouvement en lui-même et de son rapport à la radicalité. Au Figaro Vox, certains voient encore le mouvement des gilets jaunes d’un bon œil, et d’autres sont un peu réticents. Donc cela devient un peu difficile de traiter la question puisqu’on ne sait plus trop sur quel pied danser, comment apporter un angle différent. »
Journaliste stagiaire, Figaro Vox

C’est trop rapidement analysé par les journalistes qui sont souvent des petits bourgeois
« On amalgame Gilets jaunes et casseurs. Mais en même temps je ne dénigre pas non plus les casseurs. Je pense que pour eux c’est peut-être leur seul moyen d’expression et que ce sont des gens qui n’en peuvent plus. Après on peut aussi parler de la violence politique qui existe ! Des courants politiques prônent la violence aussi. C’est pourquoi les casseurs, ce ne sont pas des débiles mentaux qui savent que casser, c’est un choix d’expression. Ce n’est malheureusement pas vu comme ça et je pense que c’est trop rapidement analysé par les journalistes qui sont souvent des petits bourgeois qui résument la violence à « Oh là là les méchants casseurs ». Le pouvoir doit vraiment se demander ce que signifie cette violence et quel est son sens. Je pense que la violence des casseurs est moins violente que les mots de certains, comme Monsieur Macron, qui est, selon moi, violent dans ses propos. »
Journaliste, Sud-Ouest

Il y a des médias qui se posent plein de questions
« Mais encore une fois il y a des médias qui se posent pleins de questions et qui traitent ces manif-là en traitant à la fois les violences qui sont commises, à la fois les discours qui sont portés derrière, et d’ailleurs même quand y avait eu le 1er mai, un média comme Libération avait interviewé les “Black Blocs”, et fait une enquête en recueillant des témoignages de “Black Blocs” pour faire sortir l’idéologie qu’il y avait derrière, les revendications qui étaient portées derrière. »
Journaliste pigiste, ex-Direct Matin, La Croix 

La principale image que je perçois du traitement médiatique est celle d’une violence totale
« Globalement, le discours médiatique a été très centré sur les violences avec beaucoup d’images de dégâts matériaux et sur les affrontements physiques. La parole s’est également libérée sur Twitter, qui sert beaucoup aux journalistes pour approfondir ou commenter un sujet, pour alerter les médias et l’opinion publique notamment sur l’utilisation des lanceurs de balles de défense lors des manifestations. Mais si, d’après moi, la principale image que je perçois du traitement médiatique est celle d’une violence totale, je pense que les journalistes sur le terrain ont réellement retransmis leur vécu qui a dû être brutal – en particulier pour les journalistes des chaînes télévisées d’information en continu. »
Journaliste pigiste, Paris

On n’a pas été trop mauvais
« 
« Au début, ce mouvement parut aux yeux des médias et du public comme sympathique, mais il y a eu un renversement lors des premières violences. Pour ma part, je ne me sens pas trop concernée par ces critiques ; Mediapart a toujours parlé des violences policières contre les Gilets jaunes et les journalistes et vice-versa des violences des Gilets Jaunes vis-à-vis des policiers. Je trouve que nous avons retranscrit avec le plus de sérieux et d’objectivation possible ce mouvement, on n’a pas été trop mauvais. »
Journaliste 1, Mediapart

La seule limite c’est celle de la violence
« C’est un mouvement inédit, fort, avec des formes de mobilisation nouvelles, totalement apolitique et « asyndiqué ». Il n’y pas vraiment de critique à faire du traitement médiatique des Gilets jaunes, je pense que la seule limite, la seule barrière c’est celle de la violence. »
Journaliste, Brut

Les journalistes de terrain sont beaucoup moins audibles que les éditorialistes
« De l’autre côté, les journalistes ont – notamment avec l’augmentation des violences policières – tenté de mieux comprendre le mouvement et traité le sujet avec plus de compréhension, parfois d’indignation. Malheureusement, les journalistes de terrain sont beaucoup moins audibles que les éditorialistes. »
Journaliste, Brut

Ils incarnaient soit des « beaufs » en 4×4 soit des personnes issues de milieux populaires
« Les médias ont alors eu tendance à essentialiser le gilet jaune, avec une focale constamment posée sur des réactionnaires s’insurgeant à l’égard de la taxe carbone sans être prêts à protéger la planète ou a contrario des personnes dont on ne sait si elles travaillent ou vivent de l’aide sociale. Nous étions là dans une forme totale de caractérisation, dans laquelle la violence a très rapidement été médiatisée et où les Gilets jaunes incarnaient soit des « beaufs » pollueurs en 4×4 soit des personnes issues de milieux très populaires. Ce prisme d’observation n’a en aucun cas cherché à entrer dans la vie de ces manifestants. »
Journaliste photographe, documentariste

« Pas de 20h sans casseur »
« Le rôle de la violence est important dans ce mouvement-là, où des tags ont été inscrits « pas de 20h sans casseur ». C’est-à-dire qu’il y a une prise en compte des mécanismes médiatiques par une partie du mouvement, qui sont à mon avis des gens très structurés politiquement. Donc ils ne sont pas du tout représentatifs de la majorité. Quand on est journaliste, nous devons faire notre travail. Donc, quand des violences ont lieu, évidemment il y a un côté photogénique, mais ne pas en rendre compte serait déloyal. A partir du moment où il se passe quelque-chose, nous sommes censés en rendre compte. Donc oui, nous avons conscience qu’en tant que journaliste, il y a eu un piège avec les violences. Mais en même temps, la morale nous oblige à en rendre compte. »
Journaliste photographe, documentariste

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